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La grande illusion
Le style des bijoux de l’Opéra suit logiquement l’évolution des grandes tendances de la mise en scène d’opéra et de ballet, du XIXe siècle à nos jours : romantisme, grand opéra, symbolisme, postmodernisme.
Qu’ils aient été préservés comme des trésors, réutilisés dans des contextes différents, ou partiellement recyclés, les bijoux racontent aussi une conception de l’illusion. Comment rendre l’Histoire vraisemblable ? L’ailleurs, plausible ? Le passé, renouvelé ? Le bijou de scène est là pour nous faire croire, douter ou simplement nous émerveiller.
La Révolution française puis l’épopée napoléonienne expliquent le changement de statut de l’Histoire au XIXe siècle : elle se cherche une philosophie (Hegel) voire tente de se définir comme science (Taine, Marx). Cela explique la frénésie des sujets historiques au théâtre comme à l’Opéra, à la génération romantique, au Second Empire, puis jusqu’au début du XXe siècle.
La partie valant pour le tout, mise en scène, décors, costumes et bijoux reflètent cette tendance. Mais comment traiter l’Histoire ? Certains costumiers passent de longues heures à étudier les sources tandis que d’autres laissent libre cours à leur fantaisie créatrice.
Couronne portée par Rose Caron dans le rôle d’Elisabeth dans "Tannhäuser" de Richard Wagner / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe-casque pour "Déjanire" de Camille Saint-Saëns / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Bracelet en forme de serpent pour "Déjanire" de Camille Saint-Saëns / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe pour "Henry VIII" de Camille Saint-Saëns / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Casque pour "Robert le Diable" de Giacomo Meyerbeer / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
L’Histoire théâtralisée à l’Opéra de Paris est aussi une affaire de frontières, franchies et redessinées.
Ce n’est donc pas un hasard si l’égyptomanie européenne issue de l’expédition bonapartiste se retrouve, à la fin du XIXe siècle, dans la version parisienne d’une Aida créée au Caire par Verdi. Ou que le grand opéra de Giacomo Meyerbeer ayant valeur de testament soit une Africaine qui nous renvoie au temps des grandes découvertes. Plus tard, les Expositions universelles, mais aussi l’expansion coloniale de la France, feront rêver les spectateurs parisiens.
Dans tous les cas, le bijou de scène devient l’indice nécessaire d’une forme d’exotisme. Mais le précieux et l’extravagant hésitent entre précision ethnologique et licence poétique débridée.
Maquette de costume pour "Lakmé" de Léo Delibes / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Casque porté par Bessie Abbott dans le rôle-titre de "Lakmé" de Léo Delibes / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Illustration de presse pour "Djelma" de Charles Lefebvre - A. de Parys (1894) / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe portée par Rose Caron dans le rôle-titre de "Djelma" de Charles Lefebvre / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe pour "L’Africaine" de Giacomo Meyerbeer / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe pour "L’Africaine" de Giacomo Meyerbeer / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe pour "Aida" de Giuseppe Verdi / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Collier-plastron pour "Aida" de Giuseppe Verdi / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Ensemble de bracelets de poignet, d’avant-bras et de bras pour "Aida" de Giuseppe Verdi / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe portée par Meyrianne Héglon, dans le rôle de la Javanaise Pyrrha de "La Burgonde" de Paul Vidal / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Maquettes de costumes pour "Yedda" d’Olivier Métra / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe pour "Yedda" d’Arnold Mortier / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Coiffe pour "Le Fils de l’Étoile" de Camille Erlanger / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Torque / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Bracelets d’avant-bras d’inspiration égyptienne / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Diadème porté par Ada Adiny dans le rôle de la Duchesse d’Etampes dans "Ascanio" de Camille de Saint-Saëns / BnF, département de la Musique, Bibliothèque-musée de l’Opéra
Magnifié le temps d’une production, le bijou de scène était souvent, pour des raisons économiques, démonté afin de resservir à de nouvelles productions, ce qui rend d’autant plus intéressant le cas des rares bijoux intégralement conservés.
Quand ils sont réutilisés, les bijoux de scène relativisent la signification de l’accessoire, celui-ci passant d’une période historique à une autre, ou changeant de symbole comme de personnage et d’interprète.
De nos jours, la réutilisation des matériaux devient plus rare. Dans les mises en scène, le bijou revêt souvent une dimension plus symbolique que véridique ou littérale, jusqu’à se fondre dans l’étoffe, renouant, paradoxalement, avec le costume bijouté de l’Ancien Régime.
INFORMATIONS PRATIQUES
Du 28 novembre 2024 au 28 mars 2025 inclus, à la Bibliothèque-musée de l’Opéra national de Paris
L'exposition est accessible dans le cadre d'une visite du Palais Garnier, hors jours de fermeture exceptionnelle (voir le calendrier) :
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