Continuo

Créée en 1971 pour l'école du Royal Ballet de Londres, cette oeuvre fut initialement pensée pour de jeunes danseurs, ce qui reflète l’intérêt du chorégraphe pour transmettre son art à la jeune génération et l’importance qu’il accordait à la formation des interprètes.
Continuo est souvent perçu comme une pièce pédagogique, mais cela ne diminue en rien sa profondeur artistique. Tudor a conçu cette oeuvre comme un exercice de musicalité et de fluidité. Réglée sur le célèbre Canon en ré majeur de Johann Pachelbel, la chorégraphie s’inscrit dans une esthétique minimaliste et méditative. La genèse de Continuo s’explique également par l’intérêt constant de Tudor pour des oeuvres à petite échelle, dans lesquelles l’intimité et la sincérité du geste sont au coeur de l’expression artistique.

Loin des grandes productions ou des récits dramatiques qui marquent d’autres de ses créations, Continuo représente une sorte de respiration : un moment de calme et de réflexion, tant pour les danseurs que pour le spectateur. Conçu comme un ballet abstrait, Continuo s’éloigne des récits complexes et des drames psychologiques souvent associés aux oeuvres les plus célèbres de Tudor, comme Jardin aux Lilas ou Pillar of Fire.

Ici, Tudor explore la simplicité et la musicalité pure, en s’appuyant sur le langage du mouvement pour traduire une émotion universelle et intemporelle. Tudor utilise un effectif réduit : six danseurs en trio qui exécutent des portés, des arabesques et des mouvements en canon, mettant en avant une fluidité continue et une harmonie qui semble ininterrompue.

Napoli

Présenté pour la première fois à Copenhague en 1842, Napoli est le chef-d'oeuvre d'August Bournonville. Son argument, structuré en trois actes, raconte comment la jolie Teresina, fiancée au pêcheur Gennaro, est emportée en mer par les flots d'un orage.
Le maître des eaux, le maléfique Golfo, la recueille au fond de la Grotte bleu sur l'île de Capri, et, séduit par sa beauté, la métamorphose en naïade.

Elle délivrée de son sortilège par Gennaro, munis d'une image de la madone, dont la vue permet de vaincre les forces diaboliques. Rendus à la liberté, les deux jeunes gens pourront célébrer leurs fiançailles. Le récit suit parfaitement les règles du ballet romantique : à un premier acte se déroulant dans le monde réel, succède un deuxième acte ouvrant sur un monde surnaturel.

Après ce détour au cours duquel le courage et la fidélité des deux héros sont mis à l'épreuve, le troisième acte les ramène sur la terre ferme, dans le bonheur d'une série de danses, moments de joie pure, où Bournonville déploie toute la force de son style : un mouvement incessant, où la danse, gracieuses, pleine d'épaulements élégants, de phrasés et de batteries rapides, s'exécute dans une apparente simplicité. [...]

Au début du XXe siècle, Hans Beck, disciple de Bournonville reprend et fixe les variations du Pas de six du troisième acte et introduit cinq soli issus du ballet Abdallah (1855).
^{Erik Aschengreen}
7 danses grecques

Dans ces 7 danses grecques, Mikis Theodorakis a réussi à nous donner un aperçu de la musique grecque à la fois traditionnelle et populaire, tout en construisant une partition qui, souvent, a la rigueur et la force d’un Jean-Sébastien Bach. Dans ce ballet, je n’ai pas cherché autre chose que de « coller » à la partition, avec le parfum d’un folklore riche et dynamique tout en faisant une suite de danses (sept, chiffre magique), où la danse classique la plus pure se marie à un certain folklore transcendé, avec un clin d’oeil à des mouvements contemporains.

Ce que nous nommons le « folklore » (pour ma part, je préfère la formule « arts traditionnels ») est toujours difficile d’accès et presque insaisissable. Nos civilisations nous ont tellement éloignés de l’esprit traditionnel qu’il nous est difficile de concevoir le processus mental ayant donné naissance à cet art dans un passé souvent lointain. C’est pourtant là qu’est la clef du problème : devenir l’autre et non pas dépeindre l’autre. Prendre la création par la ligne intérieure, sa force cachée qui est de comprendre les racines d’un peuple, d’un groupement ethnique ou culturel et réduire au minimum les citations folkloriques évidentes.

Dans le cas de la danse, les reconstitutions archéologiques ou populaires ont souvent un côté guindé et pathétique. On oscille entre le musée et le music-hall. Pour ces Danses grecques, j’ai cherché à limiter le plus possible les emprunts à des « pas » authentiquement grecs. Certaines danses en contiennent deux ou trois, d’autres pas du tout, et ce sont probablement les plus réussies, et au fond les plus grecques ! »

^{Maurice Béjart, avril 2000}