Invité par Octave Magazine à imaginer la scène de l’Opéra dans 350 ans, le Collectif Tournesol repense le bâtiment et les codes du genre. Avec une salle à 360° et ouverte sur le monde, le collectif donne corps à cet art dit « total ».
L’opéra a traversé les siècles tout en gardant sa structure originelle, qui s’articule généralement
autour de quatre axes.
1. L’histoire racontée se partitionne en actes.
2. À chaque acte se monte, souvent, un nouveau décor.
3. Les spectateurs sont face à la scène.
4. La pièce se joue dans une salle noire.
Ascesa revisite la salle traditionnelle, désormais affranchie de la technique. Le bâtiment devient lui-même scène, oeuvre et symbole. Chaque étage accueille un acte avec son propre univers. Les spectateurs sont transportés verticalement, de scène en scène, suivant les personnages qui jouent et chantent dans une ascension théâtrale. Telle une tour de Pise, sa façade vitrée reflète et s’ouvre sur la ville. De jour comme de nuit, l’opéra devient alors signal et spectacle pour toute la ville.
Chaque scène est unique, le décor se crée et s’adapte à l’histoire racontée. Tantôt terrain montagneux, forêt dense ou encore désert, il se compose de formes construites, de mapping vidéo et d’hologrammes.
Lorsque la scène se termine, l’interprète monte par l’escalier scénique, et les spectateurs poursuivent leur ascension grâce aux gradins mobiles pour une transition confortable toute en douceur. Quant à l’orchestre, il est dématérialisé et laisse place à de nouvelles pratiques musicales contemporaines.
Inspirée par le cercle instinctif qui se crée autour des artistes de rue, la scène circulaire demande aux interprètes un jeu nouveau. L’énergie circule différemment, la performance est totale car on ne peut se dévoyer. Aussi le cercle instaure l’égalité parmi les spectateurs, et dans cet espace à 360 degrés, le public retrouve dans les visages opposés une suggestion inconsciente et collective des sentiments auxquels il est appelé à s’abandonner.
La scène est totalement ouverte sur le monde. L’extérieur n’est plus un handicap incontrôlable pour la représentation. Au contraire, il fait partie du décor et interagit avec interprètes et spectateurs.
La lumière naturelle, filtrée et maîtrisée par un vitrage électrochromique, dessine la scène tel un projecteur, ses ombres jouent avec le décor. L’opéra a passé trop de temps dans des salles noires.