Le projet de salle de l’Opéra Bastille est très différent de toutes les constructions antérieures de l’Opéra, car il ne s’agit pas de remplacer une salle disparue, mais d’anticiper les besoins de l’Opéra aux XXe et XXIe siècles. Le Palais Garnier accueille un nombre trop faible de spectateurs et génère trop peu de recettes en regard des lourds coûts d’exploitation. D’un point de vue technique, il a du mal à répondre à une volonté de programmation plus ambitieuse. Dans le cadre des Grands Projets, François Mitterrand approuve en 1981 de construire un Opéra « moderne et populaire ». La place de la Bastille est choisie à la fois pour sa dimension symbolique dans le cadre du bicentenaire de la Révolution Française et pour rééquilibrer la géographie des théâtres parisiens, principalement localisés dans l’Ouest.
Le cahier des charges est établi par Michael Dittmann, metteur en scène et ancien assistant de Rolf Liebermann. Le projet est ambitieux : une scène immense, une jauge de 2 700 spectateurs, 16 plateaux latéraux, un auditorium, un studio, un amphithéâtre, mais aussi des espaces pour les ateliers, les salles de répétition et les locaux administratifs. Sur les 757 propositions déposées, c’est le projet de Carlos Ott qui est retenu : de forme semi-circulaire, l’édifice se fond dans la place de la Bastille, bien qu’il ne soit pas du goût de tous les riverains lorsque les travaux débutent en 1984. Le projet s’enlise à cause du manque de soutien politique lors de la cohabitation, mais le ministre de la culture Jack Lang le porte à son terme. Seul le projet de la salle modulable est repoussé. Son ouverture est prévue pour 2023.
L’inauguration le 13 juillet 1989 fait découvrir au monde entier une salle immense, à l’acoustique sophistiquée. L’Opéra Bastille devient la plus grande scène existante et les dimensions exceptionnelles du plateau permettent de stocker les décors de plusieurs spectacles sans les démonter, et donc de donner jusqu’à cinq productions en simultané. C’est avec Les Troyens (Berlioz), mis en scène par Pier Luigi Pizzi le 17 mars 1990, que les spectacles commencent réellement à Bastille.