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Denis
Darzacq

Photographe

Denis Darzacq développe un travail personnel depuis le milieu des années 1990. Comme beaucoup d’autres photographes français de sa génération, Denis Darzacq a commencé dans la photographie de presse, où il a forgé son travail artistique et aiguisé son œil pour la société contemporaine. Darzacq prend le temps pour un travail de terrain patient au contact direct de son sujet. Il a toutefois rompu avec les reportages et leur valeur de témoignages pour adopter une approche plus analytique, ce qui l’a conduit à des séries formellement très cohérentes.

Si les gros plans de la série Only Heaven révèlent encore l'implication personnelle de son auteur, les vues plongeante d'Ensembles ou frontales de Bobigny centre ville puis des Casques de Thouars traduisent une mise à distance du sujet, voire un artiste en position de retrait. Surtout, Denis Darzacq a acquis la conviction qu'une image construite pouvait paradoxalement servir son analyse de la société avec plus d'efficacité. Depuis 2003, il a recours à des mises en scène qui reposent toutes sur le principe de la disruption. Par leur état ou leur pose, les corps mis en scène bouleversent l'ordre établi, mais sans jamais faire basculer l'image dans le spectaculaire. Des hommes et des femmes marchent nus dans des zones pavillonnaires, d'autres semblent figés en apesanteur dans l'espace ou entre des rayons de supermarchés. Des personnes en situation de handicap reprennent possession de l'espace public. Le montage numérique que l'artiste n'avait jusqu'alors jamais utilisé, lui a permis, dans la série Recomposition I, de pousser plus à fond cette logique perturbatrice.

Le corps apparaît comme le dominateur commun des recherches de Denis Darzacq. Il y a des exceptions – des motifs plus abstraits comme les natures mortes de Recomposition I ou les reflets de sources lumineuses de Fakestars – qui traduisent un même sens de l'observation des signes du monde contemporain. Denis Darzacq conçoit le corps comme une sculpture ; mais une sculpture en forme de commentaire social car le corps ne peut être extrait du contexte avec lequel il interagit. Le corps devient l'outil d'une critique des difficultés et des stigmatisations auxquelles se heurtent certains groupes, tout particulièrement les jeunes des quartiers défavorisés ou des zones reléguées et, plus globalement comme dans Act, les populations en marge. Denis Darzacq pointe les contraintes et les contradictions sociales. Mais il invite aussi, par la rupture de gestes dépourvus de sens, à affirmer une identité toujours plus complexe que celle qui nous est assignée et à reconquérir une forme de liberté là où elle semble avoir disparu.